Sept ans après la fameuse baisse à 80 km/h, le sujet refait surface. L’Eure vient d’annoncer le retour du 90 km/h sur plusieurs de ses axes principaux. Pour beaucoup d’automobilistes, c’est un petit vent de liberté. Pour d’autres, un risque inutile. Entre sécurité, bon sens et ras-le-bol des restrictions, la France rouvre un vieux dossier. Et cette fois, les départements comptent bien avoir le dernier mot.
Le retour du 90 km/h s’installe
L’Eure n’est pas le premier à franchir le pas. Plusieurs départements ont déjà relevé la limitation sur certaines routes. La décision repose sur un constat simple. Le 80 km/h généralisé n’a pas tenu toutes ses promesses. La mortalité routière a baissé mais pas partout. De plus, ce n‘est pas toujours à cause de la vitesse. Dans de nombreux secteurs ruraux, les routes sont larges, bien entretenues, et les accidents y sont rares.
Thierry Plouvier, vice-président du département chargé des mobilités, résume le sentiment général : « On ne peut pas gérer une petite départementale de montagne comme une grande ligne droite entre deux villes. » L’idée, c’est d’adapter les règles à la réalité du terrain. Là où la visibilité est bonne et le trafic régulier, le retour du 90 km/h retrouve du sens.
Des critères précis avant tout changement
Les routes ne repasseront pas toutes à 90. Loin de là. Les équipes du département de l’Eure passent chaque axe au peigne fin. Visibilité, largeur, densité de circulation, historique d’accidents… tout est scruté avant de donner le feu vert.
Les grandes départementales, celles qu’on emprunte pour aller bosser, devraient être les premières concernées. Elles relient souvent des bourgs à des villes moyennes, avec peu de croisements dangereux. En revanche, les zones plus sinueuses ou proches des villages resteront à 80. Pas question de tout relâcher.
Le retour du 90 km/h n’est pas un coup de tête, mais une décision encadrée. Avant chaque modification, une commission de sécurité routière valide le projet. Puis vient le remplacement de la signalisation, estimé à 200 000 euros pour l’ensemble du département. Les panneaux changent, la communication s’organise, et les conducteurs sont prévenus pour éviter toute confusion.
Une mesure qui change le quotidien des conducteurs
Pour beaucoup d’automobilistes, la différence est plus psychologique que réelle. Rouler à 90 au lieu de 80, ce n’est pas gagner une heure sur la journée, mais quelques minutes de confort et une sensation de fluidité retrouvée. Sur les grands axes, la circulation se stabilise, les dépassements sont plus naturels, et le sentiment de contrainte s’allège.
Mais tout n’est pas qu’une question de plaisir de conduite. La sécurité reste le point d’attention principal. Les autorités le répètent : si l’accidentologie repart à la hausse, le retour du 90 km/h sera réévalué. Un suivi régulier des chiffres est prévu pour mesurer l’impact réel de cette nouvelle phase.
Sur le plan pratique, cette mesure pourrait aussi soulager les forces de l’ordre, souvent critiquées pour la multiplication des contrôles à 80 km/h sur des routes pourtant sûres. L’idée n’est pas d’encourager la vitesse, mais de retrouver une cohérence.
Ce qui change vraiment sur le terrain
Les axes concernés ne sont pas choisis au hasard. Les routes rectilignes, bien dégagées, souvent à fort trafic, mais peu accidentogènes, sont privilégiées. Les itinéraires de liaison entre zones économiques ou urbaines passent en priorité.
À l’inverse, les routes traversant des villages, les zones d’écoles ou les tronçons connus pour leurs virages serrés garderont la limitation actuelle. L’approche est locale, pragmatique. Le retour du 90 km/h ne vise pas à tout uniformiser, mais à rendre la réglementation plus intelligente, plus souple.
Derrière cette évolution, on devine une volonté de réconcilier les automobilistes avec la politique de sécurité routière. Moins de frustration, plus de responsabilité. Chacun doit s’adapter, rouler prudemment, mais sans se sentir puni à chaque ligne droite.
Une nouvelle ère pour la route
Le débat reste vif. Certains y voient une avancée logique, d’autres un recul en matière de prévention. La vérité, c’est que le sujet dépasse la simple question de vitesse. Il parle de confiance, de liberté, de rapport au risque.
Le retour du 90 km/h symbolise une nouvelle approche : celle qui privilégie la donnée locale au dogme national. La France redonne un peu de marge à ses territoires. Une manière d’admettre que la route d’un village normand n’a rien à voir avec celle d’un col alpin.
Reste à voir si cette flexibilité portera ses fruits. Les prochains mois diront si la courbe des accidents reste stable. Mais une chose est sûre : les conducteurs, eux, attendaient ce geste depuis longtemps. Une petite victoire du bon sens sur la rigidité. Et peut-être, un nouveau départ pour la sécurité routière à la française.