Un âge, une ligne invisible : l’interdiction de conduire pour les seniors devient réalité pour certains véhicules lourds.
Ce n’est pas une rumeur ni une simple mesure locale. C’est une décision qui fait réagir et qui divise. Elle pourrait bien s’imposer ailleurs. Depuis 2025, l’Italie a mis en place une interdiction de conduire pour les seniors de plus de 68 ans lorsqu’il s’agit de prendre le volant de poids lourds. Une page se tourne pour bon nombre de professionnels du transport, et la décision, loin de passer inaperçue, bouscule tout un équilibre.
Seniors : une réforme qui serre la vis au volant
Ce que beaucoup redoutaient est devenu réalité. L’article 126 du Code de la route italien a changé la donne : toute personne de plus de 68 ans ne peut plus conduire de camions ni de semi-remorques, même si son permis est en règle. Cette interdiction de conduire pour les seniors s’applique aux détenteurs des permis C et CE, les autorisations spécifiques à la conduite des poids lourds en Italie. La loi ne laisse place à aucune tolérance : à 69 ans, les clés du camion restent au clou.
Et ceux qui choisissent de braver cette règle s’exposent à des sanctions lourdes. Amende de 1 200 euros. Suspension de permis pouvant grimper jusqu’à huit mois. Les autorités italiennes ont clairement décidé de serrer les rangs. Pour elles, cette tranche d’âge n’a plus sa place derrière le volant d’un 38 tonnes. La conduite des poids lourds en Italie devient une affaire de jeunesse et de vigilance accrue.
Mais il faut le préciser : cette interdiction ne concerne pas les voitures ni les deux-roues. Les permis A et B restent valides, tant que les conducteurs remplissent les conditions médicales imposées. Des contrôles médicaux réguliers sont d’ailleurs déjà en place, dès 50 ans pour les pros, et à partir de 60 ans pour les autres. Une façon de maintenir un filet de sécurité sans couper brutalement l’accès à la route.
Une décision guidée par les chiffres et les drames
L’Italie n’a pas tranché au hasard. Les statistiques sont venues peser lourd dans la balance. Depuis plusieurs années, les seniors sont surreprésentés dans les accidents impliquant des camions. Trop souvent, les mêmes causes reviennent : réflexes plus lents, erreurs d’inattention, fatigue prolongée. Et face à des engins de plusieurs tonnes, l’erreur ne pardonne pas.
Le ministère italien de l’Intérieur a donc tranché, avec la conviction qu’il fallait agir. D’autres pays partagent ce constat. En France, en 2021, on comptait 449 morts parmi les automobilistes de 75 ans et plus. Des chiffres qui interrogent, qui alimentent le débat, et qui rappellent à quel point la route n’est jamais un espace neutre.
La conduite des poids lourds en Italie est désormais réservée aux plus jeunes. Mais ce choix ne sort pas de nulle part. Il s’inscrit dans une tendance européenne plus large. Bruxelles envisage un permis spécial pour les conducteurs de plus de 70 ans. Avec des règles de renouvellement tous les cinq ans, et un bilan médical obligatoire. Une manière de ne pas interdire, mais de vérifier. L’Italie, elle, a préféré couper court.
Entre protection et liberté : un équilibre fragile
Pas étonnant que cette interdiction déclenche autant de discussions. Pour certains, c’est un soulagement. Pour d’autres, une injustice. Parce qu’elle pose une question brûlante : jusqu’à quel âge peut-on continuer à exercer un métier ou une passion, sans qu’une date de naissance ne vienne tout arracher ?
Derrière cette réforme, il y a des vies. Des chauffeurs avec quarante ans de route dans les jambes, qui se retrouvent soudain sur la touche. Pas par fatigue. Pas par choix. Juste parce qu’ils ont soufflé leur 69ᵉ bougie. Cette interdiction de conduire pour les seniors est brutale, et certains la vivent comme un coup déchirant à leur identité.
La France, pour l’instant, observe. Aucune limite d’âge officielle. Mais les lignes bougent. Le vieillissement de la population force à repenser l’accès à la route. Et la pression montante d’une Europe qui harmonise ses règles pourrait bien finir par imposer une mesure similaire. L’expérience italienne, jugée trop radicale par certains, pourrait devenir un modèle.
Face à ce changement, chacun s’interroge. L’équilibre est mince entre la nécessité de protéger tous les usagers et celle de respecter la dignité des plus âgés. L’interdiction de conduire pour les seniors révèle ce tiraillement. Elle nous met face à une réalité brutale : la liberté de conduire n’est jamais acquise, même pour ceux qui ont passé leur vie sur la route.